Le Pastafarisme
Ils rêvent de pouvoir porter une passoire sur la tête sur leur photo d'identité et vénèrent un monstre en spaghettis volant.
Depuis plus de dix ans, les Pastafariens manient l'ironie et l'absurde pour questionner les dogmes religieux et les croyances.
"Il y a autant de sens de croire en un monstre en spaghetti volants qu'en Dieu"
Pour le philosophe François De Smet, le pastafarisme, cette parodie de culte qui a pour dieu un plat de pâtes, illustre
l'absurdité des autres religions.Un "Monstre en spaghetti volant" qui aurait créé l'Univers en quatre jours au lendemain d'une grosse
cuite. A priori, le pastafarisme, parodie de religion initiée par un étudiant américain en 2005, a tout d'une blague potache comme
seuls les campus savent les initier. Mais, comme le montre le philosophe belge François De Smet dans son formidable Deus Casino
(PUF), l'affaire est bien plus sérieuse que cela. Derrière son invraisemblable Dieu qui ressemble à un plat de Panzani assorti de
boulettes de viande, cette nouvelle croyance (qui séduit tant les athées) interroge sur l'absurdité des autres religions, au même titre
que la fameuse théière céleste de Bertrand Russell. Selon François De Smet, entre ce "Grand Nouilleux" alcoolique et les Evangiles
ou le Coran, les dogmes sont ainsi tout aussi peu crédibles d'un point de vue rationnel. La principale différence est que le
christianisme et l'islam ont pour eux le bénéfice de plusieurs siècles d'ancienneté...
Françoise De Smet : J'ai découvert le pastafarisme par hasard. En Belgique, on m'a demandé d'animer une réunion pastafarienne.
Je me suis retrouvé entre un "Grand nouilleux" et des gens avec des passoires sur la tête. Mais très vite, on a abordé des sujets
sérieux : les croyances, l'intégrisme, la laïcité... Ça avait un côté totalement burlesque et en même temps très sérieux. En me
documentant, j'ai réalisé qu'on est face à un phénomène moins léger qu'on ne peut le croire. Le pastafarisme est une religion factice
inventée en 2005 par un étudiant américain, Bobby Henderson. Il a envoyé une lettre au comité d'éducation du Kansas qui venait
d'autoriser l'enseignement, en cours de sciences, du dessein intelligent, ce créationnisme soft, à côté de la théorie de l'évolution.
Invoquant le même pluralisme philosophique dont se prévalait le comité pour autoriser l'enseignement de deux théories parfaitement
contradictoires, Henderson a réclamé qu'on enseigne une troisième théorie de la création, qui explique que le monde a été créé par
une divinité inédite se présentant sous la forme d'un gigantesque plat de pâtes accompagné de boulettes de viande. Le Monstre
aurait créé l'Univers au lendemain d'un soir de cuite, après avoir éclusé trop de bières (ou de Pastis du côté de Marseille). La lettre
ouverte de Henderson est vite devenue virale sur internet, et la "bonne nouvelle" pastafarienne a connu un succès mondial.
Comment expliquez-vous le succès de Monstre en spaghetti volants ?
Au-delà de la blague potache, je pense que le pastafarisme comble un manque : les athées et agnostiques n'ont pas fanion. Les
athées ont ainsi rarement une posture revendicatrice.
Propos recueillis par Thomas Malher, (L’Express, 5/03/2020)
EN POLOGNE, LE "PASTAFARISME", UN CULTE PARODIQUE, VIENT DE DEVENIR UNE RELIGION
OFFICIELLE.
Au nom du père, du fils et des spaghettis. Vénérer les pâtes et la bière est désormais une religion en Pologne. Le "pastafarisme", ce
culte parodique dont le dieu n’est autre que le "Monstre spaghetti volant", vient d'être reconnu comme une religion officielle en
Pologne, raconte le quotidien anglais The Independant. Après un long combat judiciaire des "pastafariens", ces derniers, réunis
devant le tribunal de Varsovie, ont accueilli la décision de la cour aux cris de “Pasta !”. Une journée placée sous le signe “de la
réussite du Monstre”, se sont encore réjouis les "pastafariens" polonais.
“Nous ne nous prenons pas au sérieux”.
Selon le site consacré au pastafarisme [en anglais], ce culte aurait “existé en secret pendant des siècles", avant d’être révélé au
grand jour en 2005. Le site précise également les croyances et pratiques religieuses des fidèles : “ nous adorons la bière”, “nous ne
nous prenons pas au sérieux” (Les pastafariens marseillais penchent plutôt pour un ou plusieurs ‘Pastis’. Une profession de foi qui
dénonce également la “désinformation catholique”, qui vaut aujourd’hui aux pirates - considérés comme les pastafariens originels,
sorte de prophètes - d’être perçus comme des criminels.
Ci-dessus, pastafarienne militante coiffée de la passoire emblématique
R’AMEN
La décision de reconnaître le pastafarisme n’enchante donc pas du tout l’église catholique polonaise, qui considère le mouvement
comme une provocation. Car le culte est souvent perçu comme une parodie du christianisme. Tout bon "pastafarien" finit en effet sa prière par le mot “R’amen”, en référence aux nouilles japonaises, ou au très chrétien “amen”.
Ci-dessous, initiation pastafarienne
Ci-dessus, Adam et Dieu ,détail du chef d’œuvre de Michel-Ange au plafond de la chapelle Sixtine
Le monstre nouilleux manifestera-t-il la même empathie que Dieu en faveur de
Adam, comme le suggère la magistrale œuvre de Michel-Ange du plafond de la
Chapelle Sixtine, au risque de faire se retourner dans son tombeau le Pape Jules II ,
gardien inflexible du Dogme .
(Documentation réunie par El MORO, collaborateur de Charny-Hebdo. Charny-aux-raies -de Puisaye, le 5 janvier 2024)